Compte rendu : une journée à l’Ubuntu Party


Plan de l'Ubuntu party

L’Ubuntu Party a lieu deux fois l’an à l’occasion des sorties des nouvelles versions du système d’exploitation. Organisée par l’association Ubuntu-fr (et assisté de Parinux), elle se déroule à Paris au sein de la cité des sciences de la Villette, enfin plus précisément au carrefour numérique, un espace (de 1200m² tout de même) situé au sous-sol et indiqué par 2 misérables panneaux extrêmement mal placés. Autant dire qu’il est presque impossible de tomber dessus par hasard, seules les personnes qui veulent s’y rendre la trouve. Dommage car une meilleure signalétique et un peu plus de publicité au sein du bâtiment pourrait attirer quelques visiteurs supplémentaires qui ne venaient au départ pas pour ça. Mais bref, passons sur ce détail pour lequel les organisateurs sont sûrement impuissants. D’autant que cela n’empêche pas la manifestation d’accueillir plusieurs milliers de visiteurs sur 2 ou 3 jours. Un très beau succès qui fait parler de lui au point d’y avoir vu venir le créateur d’Ubuntu, Mark Shuttleworth, lors de l’édition de Novembre 2009 !

Un "T-shirt orange", l'uniforme des organisateurs.

C’est la deuxième fois que j’assistais à cet événement (après Novembre l’an dernier) et autant dire qu’on ne change pas une formule qui marche. On y retrouve les stands (Mozilla, April, Quadrature du Net, Framasoft, Wikimedia) quoiqu’un peu moins nombreux que dans mon souvenir, la boutique (vente de goodies Ubuntu) mais aussi et surtout des cours, conférences, ateliers, install party, espace jeux sous GNU/Linux et ordinateurs en libre service, je crois que j’ai fait le tour. Il y a de quoi s’occuper pour la journée. Il faut d’ailleurs faire des choix parfois cornéliens car de nombreuses activités ont lieu en parallèle. Si la forme ne change pas depuis l’an dernier, les thématiques proposées sont suffisamment inédites et variées pour que je ne m’ennuie pas.

Mais qui sont donc tous ces gens qui perdent une journée (ou plus) de ce long week-end pour un tel « truc de geeks ». Il y a tout d’abord ceux que j’appellerais les « T-shirts oranges », c’est-à-dire les organisateurs de l’Ubuntu Party. Il y en a partout : à l’entrée, aux stands, dans les couloirs, à la régie, au point de se demander s’ils ne sont pas plus nombreux que les visiteurs (surtout à l’ouverture quand il n’y a pas encore affluence). Mais l’accueil est toujours sympathique, le sourire présent même si les visages sont un peu fatigués après ces trois jours de dur labeur et il y a toujours quelqu’un pour répondre aux questions ou simplement venir voir si l’on aurait pas besoin d’un renseignement. Bref, le néophyte d’Ubuntu y trouvera toute l’aide dont il aura besoin !

De nombreux stands sont disponibles (April, Mozilla, Quadrature du net, boutique, etc.)

S’il n’y a donc pas encore foule à 11 heures, les salles se remplissent au fur et à mesure et l’affluence bât alors son plein en milieu d’après midi. Ubuntu est un mot sud-africain signifiant « Je suis ce que je suis grâce à ce que nous sommes tous« , un message débordant d’optimisme, de partage et d’ouverture, qui reflète on ne peut mieux la population présente lors de la journée. La première fois que je suis venu à l’Ubuntu Party, j’avoue qu je m’attendais naïvement à ne croiser que des types aux cheveux longs et gras, la peau blafarde et l’œil clignotant, mais il n’en est rien. J’avais négligé l’aspect très « grand public » de la distribution de Canonical. L’an dernier comme cette année, j’ai donc pu y croiser (en plus de quelques développeurs correspondant à la descriptions ci-dessus), des jeunes, vieux, hommes, femmes, blanc, noirs, des personnes seules, en couple, en famille, etc., bref vraiment tous âges, origines sociales ou culturelles. Cette mixité fait bien sûr baisser le niveau technique général – car il y a beaucoup de grands débutants pour lesquels le discours doit s’adapter – mais elle est un message sacrément optimiste quant à l’avenir : Ubuntu – et GNU/Linux en général – semble vraiment avoir passé un cap, le grand public s’y intéresse, que dis-je, se déplace en masse pour découvrir cette nouvelle manière d’appréhender l’informatique, pour en apprendre davantage, voire pour installer le système libre sur leur ordinateur.

Les mentalités évoluent, gageons qu’un jour nous pourrons enfin parler d’Ubuntu ou du libre en société sans passer pour un illuminé et perdre rapidement les 9/10èmes de notre auditoire… Alors certes, cette affluence est très encourageante mais soyons réaliste, ça ne fait pas encore les gros titres au 20h. Soyons patients, ça viendra car comme dit le proverbe, le CD-ROM ne s’est pas fait en un jour…

Atelier : s'initier à Wikimedia Commons

Voyons un peu le programme pour cette journée de dimanche. J’ai commencé un peu après 11h par une introduction d’Ubuntu et de l’univers GNU/Linux en général par Frédérique Mandé, suivi d’un atelier à 11h30 sur Wikimedia Commons, la banque de données permettant de stockées tous les médias (images, vidéos, sons) utilisés par l’ensemble des Wikipédia mondiaux. Nous n’étions pas très nombreux, 7 ou 8 personnes (matin oblige) mais cela n’en était pas moins intéressant, débat sur les licences de photos à l’honneur.

Conférence sur les nouveautés d'Ubuntu 11.10 par Didier Roche

Une fois terminé, j’ai pris en cours de route la conférence sur les nouveautés dans Ubuntu 11.10. L’intéressant dans cette dernière tenait plus dans le conférencier, Didier Roche, développeur français d’Ubuntu et employé de Canonical (mais aussi secrétaire adjoint d’Ubuntu-fr et auteur du livre Simple comme Ubuntu). Il était en effet très instructif d’avoir en direct le point de vue d’un développeur à temps plein sur Ubuntu et sa vision sur l’avenir du système. D’autant qu’il s’occupe beaucoup de la controversée interface Unity dont il a présenté en détails les nouveautés dans Oneiric et dans la version à venir. On comprend d’ailleurs bien que les développeurs sont tout à fait conscient des critiques actuelles sur Unity, y sont ouvert mais également qu’ils assument leurs choix. Le message général que j’ai pu en tirer est : « on sait qu’il y a des choses qui ne vont pas mais c’est normal, le projet est jeune, on travaille dessus, laissez nous du temps !« . Pointe donc un certain agacement face à certaines critiques un brin virulentes sur Unity, accompagné d’ une envie d’expliquer le pourquoi de ces choix qui ne plaisent pas toujours.

Intéressant également le passage de flambeau entre Didier Roche et le conférencier suivant qu’il semble bien connaître, Fréderic Peters, membre actif du projet Gnome. Quelques piques trollesques sur Gnome-shell montre que la concurrence est là, mais aussi que les deux projets se suivent entre eux, se tolèrent et se respectent. D. Roche précise d’ailleurs que rien n’est fait, malgré ce qu’en disent certaines mauvaises langues, pour empêcher Ubuntu de fonctionner avec autre chose que Unity. En effet, j’ai personnellement installé Gnome-Shell en 30 secondes grâce au paquet présent dans la logithèque d’Ubuntu 11.10 (parce que bon, Unity… :p) et tout fonctionne pour le mieux.

F. Peters entame donc sa conférence. Il y présente Gnome 3, les nouveautés et les décisions prises pour donner une nouvelle direction et un nouveau souffle au projet, afin de renouveler la branche vieillissante Gnome 2.X. Il parle donc rapidement de la nouvelle interface Gnome-shell (concurrente directe de Unity) ainsi que la multitude de logiciels en cours de réalisations. Car Gnome 3 ne se résume pas au simple shell et si les applications bien intégrées y sont encore rares, cela va semble t-il très vite évoluer. Une refonte de nombreux logiciels va être réalisée sur le modèle suivant : on regarde ce qui se fait sur les autres systèmes (même chez Microsoft!), captures d’écran à l’appui, on repense les fonctionnalités du logiciel pour une utilisation moderne et l’on détermine les objectifs du logiciel à créer (ou à modifier si une base solide existe déjà)  ainsi qu’une ébauche de son design. Le but est de développer toute une série d’applications utilisant les librairies de gnome 3, bien intégrée dans le système (en terme de design ou d’interconnexion des logiciels) et surtout simple d’utilisation comme la toujours voulue la philosophie de Gnome. Sans entrer davantage dans les détails, voici quelques un des logiciels qui vont être prochainement réalisés (nous avons déjà eu droit à Contacts et Documents dans gnome 3.2) :

  • Chat pour remplacer Empathy
  • Web, une nouvelle façon simple d’aborder la navigation sur Internet en lieu et place d’Epiphany, le browser assez peu usité de Gnome.
  • Clock et Calendar, pas besoin de beaucoup d’explications, les noms choisis pour toutes ces applications sont volontairement extrêmement simplistes.
  • En plus de Documents, vont bientôt apparaître Photos, Videos, Music. Un projet Files est également sur les rails pour remplacer à terme le gestionnaire de fichiers Nautilus. Le slogan servit par F. Peters au cours de cette conférence était « Les applications avant les fenêtres« . C’est bien illustré ici, une application correspond à un type de fichier, il n’y aura plus à ouvrir plusieurs fenêtres d’un Nautilus généraliste ou cohabitent pêle-mêle les fichiers images, audios ou vidéos. C’est en tout cas l’orientation que souhaite maintenant suivre Gnome.
  • Très intéressant et ambitieux, le projet Boxes (peut-être dès la version 3.4 car le projet semble avancer rapidement) permettra d’accéder à d’autres ordinateurs, aussi bien pour la connexion et prise en main à distance (en remplacement de Vinagre par exemple) que pour l’ouverture des images et la virtualisation (à la place de logiciels comme Virtualboxes).

Le reste des projets en cours est disponible ici, un appel aux designers et développeurs motivés a d’ailleurs été lancé. Au terme de cette conférence instructive, j’attends donc avec grande hâte la version de Gnome 3.4 !

openstreetmapPour continuer, j’assistais à 15h à l’atelier dédié à OpenStreetMap (ou OSM) que je connaissais déjà un peu mais pour lequel je souhaitais parfaire mon savoir afin de mieux y contribuer. Pour ceux qui ne connaissent pas ce magnifique projet, c’est en quelque sorte le wikipédia de la cartographie, créé notamment pour offrir une alternative libre et de très grande qualité à Google Map et autres projets propriétaires. Tout le monde peut donc participer en complétant et enrichissant les cartes existantes, on dénombre d’ailleurs plus de 300 000 utilisateurs actifs de part le monde à ce jour. L’intervenant, membre de la toute récente association OSM-france nous a donc présenté les origines et le fonctionnement d’OSM. Nous étions une vingtaine inscrits à ce cours, chacun disposant d’un ordinateur (sous Ubuntu bien sûr) dans une salle dédiée à l’atelier, afin de nous permettre de passer un peu à la pratique et de découvrir les différentes manières de contribuer au projet.

Benjamin_Bayart

Benjamin Bayart (source)

Deux heures très enrichissantes mais je m’éclipse malheureusement avant la fin pour assister – à déjà 17h-  à la conférence de Benjamin Bayart sur la neutralité du net. Pour ceux qui ne le connaissent pas, c’est le président de l’association FDN et l’une des principales figures des défenseurs des droits sur Internet. Petit bémol, la conférence est la même que celle de l’an dernier. Heureusement, ce type est toujours aussi intéressant à écouter et je ne me lasse pas de réentendre son exposé. Il commence ainsi par expliquer l’historique et le fonctionnement d’Internet, puis sa place dans la société,  l’évolution des usages de l’Internet, l’aberration Hadopi, les dangers du filtrage et donc l’importance de la neutralité. Sur un ton humoristique, critique, cynique et engagé, il défend ses positions avec convictions tout en tentant d’éduquer et de faire réfléchir son auditoire. J’aurai préféré l’entendre sur une thématique un peu différente – il y a tant à dire – mais peu importe, c’est clair, éducatif, ça convient parfaitement à cette Ubuntu Party (qui une fois encore ne parle pas que d’Ubuntu et sait voir un peu plus loin que le bout de son nez !). En attendant la version vidéo (toutes les conférences de l’Ubuntu party étaient filmées et diffusées en directe sur le site web), vous pouvez visualiser celle de l’an dernier ici. À voir absolument ! Je n’ai qu’une chose à ajouter, il est fort Bayart!

Je dois encore à mon grand dam partir avant la fin (la SNCF n’ayant que peu de considérations quant au fait que M. Bayart soit très bavard). Au final, pas déçu de cette Ubuntu Party, intéressante bien que surtout destinée aux débutants. Je n’y ferai peut être pas de troisième visite de sitôt car n’habitant pas dans la région, ce n’est quand même pas la porte à côté, mais je conseille à tous les fans d’Ubuntu ne résidant pas trop loin de Paris d’y faire un saut la prochaine fois (je rappelle que l’entrée est totalement gratuite ;-) ) ne serait-ce que par curiosité. C’est l’occasion d’y rencontrer d’autres passionnés et tout de même d’apprendre pas mal de choses. Si la distribution reste au cœur de la manifestation, la part belle est faite à la philosophie du logiciel libre en général et un non utilisateur d’Ubuntu peut donc également s’y rendre sans aucun problème.

Pour conclure, je dirai merci et encore bravo à tous ces T-shirts oranges qui s’échinent à organiser trois jours durant – et bénévolement – un rendez vous de cette envergure en entrée libre. Encore félicitations et laissez moi vous souhaiter toujours plus de succès pour, n’en doutons pas, de très nombreuses futures éditions.

Resources : http://ubuntu-party.org
Photos : Julia Buchner, http://www.flickr.com/groups/ubuntu-party/

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  1. #1 by Trilleau ch on 16 novembre 2011 - 18 h 09 min

    Niort,departement du poitou charente, petite ville !
    vous faites quand une Ubuntu partie ?
    merci
    a+ peut etre

  2. #2 by Pierre Cros on 17 novembre 2011 - 5 h 54 min

    « Fréderic Peters, membre actif du projet Gnome » : c’est juste LE Release Manager :-)

  3. #3 by Diogene on 17 novembre 2011 - 14 h 15 min

    Je cite :
    Le message général que j’ai pu en tirer est : « on sait qu’il y a des choses qui ne vont pas mais c’est normal, le projet est jeune, on travaille dessus, laissez nous du temps !«

    Mais QUI les a obligé à sortir un projet non terminé ? Il était possible de travailler dessus, de le proposer en option pour montrer son évolution, et de ne le présenter officiellement qu’une fois prêt. Non ?

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